le
22 décembre 2000, soleil-lune
Pleines, Bonjour Jane,
Sommes-nous
des poissons qui tentons d'échapper aux filets des pècheurs,
ou des poissons pècheurs de nous-mêmes ? Bruxelles Lyon
Venise par quels canaux passer ? Comment suivre, vissé à
ce clavier, ce courant d'eau d'air d'électricité ? Est-ce
se lever et prendre le vent ou se jeter et plonger sous le manteau liquide
?
Je n'ai pas
choisi.
Je suis tombé.
Poisson vaisseau
errant entre les cités. A travers les villes où d'autres
fleuves vides ont assêchés la marche des hommes des femmes
des enfants pris en mains.
Poissons sans
besoin.
S'arrêter
là. Poser les objets au bord de ce fil d'eau déroulant
par le centre la bobinne d'une, de plusieurs vies. Ne pas oublier de
se nourrir, tendre les filets pour manger le poisson que je suis.
Poisson sans
chaire.
Venise est
un mot sur une carte vernie, Bruxelles la rejoint dans le désordre
des lignes crevassées, clichés de satellites. Ce que je
ne prend pas, là entre les maisons posées sur l'eau, je
le trouverai par delà les ponts, loin des toits penchés,
des rues attentives au sommet des maisons, à la recherche d'une
ombre protectrice. Cet amour, l'utilité du pouvoir, je le laisse
dans les poubelles de la ville masquée de joies. Le désir
détritus de cette volonté de posséder l'objet du
désir.
Poisson torpie,
cent objectifs.
Poisson, je
suis la course des chevaux d'eaux, sautant en surface, les haies de
ces déchets que l'eau porte mais ne nourrit pas. Je retrouve,
les ricochets et une amie grenouille, je te murmure: "le corail
borde une entrée à travers laquelle le soleil luit, chaud".
Tu souris, la lumière irise ce visage que je ne vois pas.
"Si,
je la vois!"
Poisson sans
écaille.
Cents écailles
luisent. Es-tu venue te glisser contre moi ? Je fuis cette impuissance
à placer entre mes nageoires une peau. je tisse un filet de mots-à-maux
d'abscence, du bout de mes dix doigts vers ton regard. Je pend sur ces
lignes de lettres; contre la surface glacée de la rétine
où se reflète l'écran, je glisse, n'accroche rien.
Nul corps mêlé.
Poisson sans
fleuve.
Prisonnier
des parois du bassin, l'espace; du filet qui s'avance, le temps. L'un
croit à vue vers plus de présence, l'autre rétrécit
entre chaque regard. l'articulation réduit à ce double
étaux: murs contre barreaux, dynamiques conjuguées, issues
de la grammaire des prisons, et par dessus: le gardien, bec du martin-pêcheur
prêt à trouer la vie comme la lune la nuit.
Poisson cosmique-comique
Je ris à
la lune, là où d'autres hurlent; je ris aussi de sa prétention
à allumer la nuit de nuances de bleues comme l'encre bue par
le papier donne à croire au lecteur, l'utopie lue. derrière
les non-dits, et le cirque de leurs utilités se masquent d'écrans
de mémoires en circuits les appeurés de vivre.
Poisson soleil-lune.
Soleil au
centre de la rondeur du ventre du monde.
Lune glissée
au creux des rheins.
Poisson sans
passé.
J'ai fini;
fui entre les mailles du filets que je m'étais tissé,
une toile de file d'attente aux quatre coins de l'aquarium écran.
Les mémoires électriques conservent l'articulation de
nos mots silencieux. Mais dans la matière de nos mémoires
carnées nous ne sommes pas, nous n'avons jamais été.
Voilà
le poison présent, le poisson mort.
Amitiés,
Xavier
Que tes voeux
soient des fêtes où je viendrai danser.
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